Les Essais de Patrice • Alpine

Alpine 1600 S " J'habite dans le moteur"

Écrit par

Patrice Vergès (Romancier, journaliste, essayeur, auteur & chroniqueur , Petites Observations Automobiles)

Max a acquis une Alpine A110 1600 S de 1970 qui a une double valeur sentimentale à ses yeux puisqu'elle a appartenu au créateur de la marque Jean Rédélé.

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Dimanche 29 octobre 2023


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Patrice Vergès Petites Observations Automobiles - Romancier, journaliste, essayeur, auteur & chroniqueur

Membre du Gouvernement POA.

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Le pilote automobile Max Mamers à débuté sa carrière en rallyes au volant d'une Berlinette Alpine 1100 moteur Ferry à la fin des sixties. A son volant il a remporté le championnat de France des rallyes régionaux. Rappelons qu'avant être l'organisateur du Trophée Andros et des Classic Days, il a couru pendant plus de 25 ans avec succès. Il  a  disputé six fois les 24 heures du Mans, a cumulé 43 victoires au volant d'une Formule 2 en course de côte avant d'être sacré double champion de France de Rallycross en 1982 et 1983 sur une Matra Murena.

Illustration - Alpine 1600S
Alpine 1600S

Il s'agit d'une Alpine 1600 S de janvier 1970 grise Montebello encore équipée à l'avant de clignotants de NSU

Illustration - Alpine 1600S
Alpine 1600S

Comparée à nos voitures actuelles, la 1600 S paraît minuscule aujourd'hui avec 1, 52 m de large pour 1,13 m de haut

Championne du monde des rallyes !

Max a décidé de racheter les voitures avec lesquelles il a couru, du moins les modèles. La Berlinette en faisait partie  " Je souhaitais un modèle d'origine non modifié. Lorsque Jean Redélé est décédé en 2007, son fils Jean-Charles a vendu la 1600 S 1970 gris Montebello de son père immatriculée 5473 WN 75 dont j'ai évidemment conservé la plaque d'origine sous celle de la nouvelle immatriculation".

La nouvelle Alpine A110 a repris le nom et le sigle de la première  qui était déjà une voiture mythique en 1970 surtout en motorisation 1600 S, version la plus puissante de la lignée. Née en  A108 en 1960 avec le moteur de la Dauphine, elle s'était muée en A110 en 1962 en accueillant celui de la R8 puis enfin le bloc moteur de la  Renault 16  fin 1969 sous le sigle 1600 S. Alimenté par deux énormes carburateurs Weber de 45, son 4 cylindres de 1565 cm3 alignait 125 ch DIN,  une puissance exceptionnelle il y a plus de 50 ans surtout qu'ils n'avaient que 750 kilos à tirer. Il en fit la reine des rallyes surtout dans ses versions poussées à 1800 cm3 et 170 ch sanctionnée par le titre de championne du monde des rallyes fin 1973.

Illustration - Alpine 1600S
Alpine 1600S

Magnifique cet habitacle où se remarquent les imposants passages de roues imposant une conduite décentrée

Illustration - Alpine 1600S
Alpine 1600S

Née avec un 850 cm3 en version A108, la Berlinette avait  vu le volume de son moteur s'accroître au fil des versions. A gauche, les imposants carburateurs de 45 !

Bon apprentissage pour la course

A son volant, max à retrouvé toutes les sensations produites par cette voiture pas comme les autres. "D'abord, cette fameuse position de conduite avec les pieds décalés à cause du passage de roues. Ensuite, le bruit si particulier. On habite dans le moteur avec la succion des carburateurs dans les oreilles. Après cette tenue de route si particulière où il faut asseoir le train arrière qui entre le freinage et l'accélération passe du carrossage presque positif au négatif. Comparée à nos voitures actuelles c'était un bon apprentissage avec la course. À mon époque, on commençait par la R8 Gordini, puis la Berlinette et enfin la monoplace comme je l'ai fait".

Illustration - Alpine 1600S
Alpine 1600S

Les sièges cuir assez confortables étaient en option, comme l'arceau de sécurité et beaucoup d'autres choses

Illustration - Alpine 1600S
Alpine 1600S

Jantes alliage siglées du A d'Alpine de série sur la 1600 S chaussée de 165 x13

Piloter rapidement une Alpine exigeait de bonnes bases de pilotage. Son empattement ultra court de 2,10 m lié à son moteur arrière en porte à faux générait un rapport des masses délirant qui en faisait une voiture extrêmement "fine" exigeant une belle science du contrebraquage. Darniche, Therier, Andruet et Nicolas, les quatre mousquetaires de l'écurie Alpine ont signé des exploits à sont volant dont les coéquipiers voyaient le plus souvent la route par la vitre latérale plutôt que par le pare-brise. Une Berlinette était rarement parallèle à la route et ce qui explique sa fantastique maniabilité.

Illustration - Alpine 1600S
Alpine 1600S

Feux rouges empruntés à la R8

Illustration - Alpine 1600S
Alpine 1600S

Les Alpine A110 étaient fabriquées dans la nouvelle usine Alpine inaugurée en 1969

Un régal auditif et olfactif

L'originale est bien moins habitable que celle d'aujourd'hui plus volumineuse et surtout plus haute de 10 centimètres. Il faut se glisser avec souplesse dans ses minuscule 1,13 m de hauteur et ramener ses jambes dont la trajectoire est brisée par les épais passages de roue. Face à son volant ce n'est qu'un ravissement pour les yeux, devant ce magnifique bloc compteur à cinq cadrans à aiguilles vertes autrement plus chouettes que le digital, les mains posées sur un volant minuscule pendant que le levier de vitesses jaillit idéalement sous la paume de la main.

Ajoutez l'odeur, un subtil mélange de polyester et d'essence. D'ailleurs, la mécanique émet un son merveilleux autant dû à l'échappement à droite que d'aspiration des Weber à gauche. Bien restaurée, la voiture de Max  est dans un état exceptionnel dans sa superbe livrée grise métal  et ses sièges cuir.  Pour ceux qui affirment que la nouvelle A110 est trop chère qu'ils se rappellent qu'elle coûtait 34 000 francs en 1970 avec une paillassée d'option dont Redélé abusait (arceau, pare-brise chauffant, ceinture de sécurité, gros réservoir, peinture métal). Soit 68 mois de salaire pour un smicard gagnant 500 francs nets mensuels.

Pas question de la vendre pour notre pilote organisateur d'épreuves qui prépare son 35eme et dernier Trophée Andros. " La prochaine fois, on essaiera ma BMW M3, modèle avec lequel j'ai couru en rallycross en 1981 et remporté 6 victoires ". Promis, Max.

Illustration - Alpine 1600S
Alpine 1600S

Magnifique instrumentation. Dommage que la nouvelle A110 n'ait pas repris les bonnes vieilles aiguilles. Le levier de vitesses tombait sous la main

Illustration - Alpine 1600S
Alpine 1600S

Le regretté Jean Redélé au coté de son Alpine de couleur blanche qu'il avait fait repeindre en gris Montebello comme la première A110 de 1963

Illustration - Alpine 1600S
Alpine 1600S

Max Mamers a acheté sa 1600 S fin 2007

Illustration - Matra Murena 1982
Matra Murena 1982

Magnifique palmarès pour le Briviste avec notamment deux titres de champion de France en Rallycross au volant de Matra Murena à moteur Roc

L’avis des Petits Observateurs

2 commentaires au sujet de « Alpine 1600 S " J'habite dans le moteur" »

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Se trouver à côté d' une A110 aujourd'hui est un véritable choc. Il faut pour ainsi dire se mettre à genoux pour rentrer dans l'habitacle. Je ne suis pas sûr que le toit m'arrive à la ceinture. Nous sommes à présent entouré d'autos énormes. Mêmes les citadines sont plus imposantes que nos anciennes grandes routières.
Ça n'a rien à voir mais j'ai fait une petite promenade en Beaujolais hier à bord d'une Panhard Dyna X de 1951, j'ai même eu l'honneur de la conduire. Difficile d'imaginer une famille partir en vacances à son bord et pourtant....

Dimanche 29 octobre 2023 à 09h12

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En vrai, c'est mon plus beau souvenir de jeune homme auto-stoppeur en 1969, entre le Havre et Paris… À Rouen, le pouce levé je vois soudain une Alpine bleue qui s'arrête pour m'embarquer… je n'ai rien compris en ouvrant la portière (le bruit du moteur !) de ce que me dit brièvement ce monsieur un peu gros installé au volant.
Pas question de rater ça !… une Alpine ! Il démarre sec… Je suis juste saisi de bonheur en contemplant le tableau de bord, les oreilles gorgées de vibrations rauques et aigües en même temps. Et puis ça puait l'essence à plein nez et je le vois tripoter une petite manivelle entre les 2 sièges : il dit "c'est pour équilibrer l'essence entre mes 2 réservoirs droite-gauche !
En sortie de Rouen vers Paris, je suis intrigué : il a pris à gauche, la route qui va vers Pontoise. Et alors, là… j'ai compris ! Il y a une suite de lacets en côte qu'il attaque (c'est le bon terme) et c'est le seul truc que j'ai entendu clairement : "Regarde bien : je vire à plat sur la bande du virage"… c'était un virage tête-à-queue qu'il a enquillé en dérapage continu !
Un peu plus loin, une ligne droite, un camion devant nous et un autre qui arrive en face : il a foncé entre les deux et j'ai juste aperçu que le pneu du camion qu'on doublait était plus haut que le toit du bolide…
Je suis tout ému de répéter ce qui est écrit plus haut : "… les coéquipiers voyaient le plus souvent la route par la vitre latérale plutôt que par le pare-brise. Une Berlinette était rarement parallèle à la route et ce qui explique sa fantastique maniabilité."
En arrivant à Paris… il coupe le moteur Boulevard de Clichy (souvenir gravé à vie) pour me laisser descendre : je dis MERCI, monsieur… il me rassure simplement : "Tu as fait juste le bon poids pour équilibrer les masses !"
Je n'ai jamais oublié ! Quel pied… une 1300 ou une 1600 ?… qu'importe ! Encore MERCI, cher monsieur…

Dimanche 29 octobre 2023 à 15h13

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