Une rubrique pilotée par le Commandant Chatel. Voici la suite des aventures de Gérard Rossini… Va-t-il obtenir cette Hispano ??
Un GRAND MERCI à Gérard de partager ces moments de vie avec les Petits Observateurs.
Écrit par
Thibaut Chatel (Commandant Chatel, Petites Observations Automobiles)
Une rubrique pilotée par le Commandant Chatel. Voici la suite des aventures de Gérard Rossini… Va-t-il obtenir cette Hispano ??
Un GRAND MERCI à Gérard de partager ces moments de vie avec les Petits Observateurs.
Offre Partenaire LLD LOCALEASE
Offre canon en ce moment pour les professionnels sur le Mercedes GLC 300E PHEV Business à 699 euros par mois en leasing sans apport. Et toujours un mois de loyer offert grâce à POA !
Offre Partenaire WASH
Exclu communauté POA : un lavage programme 5 (valeur 17 euros) offert pour un premier achat de 35 euros avec le code POA35 !
Partager
Vendredi 15 juillet 2022
Écrit par
Thibaut Chatel Petites Observations Automobiles - Commandant Chatel
Alias "Commandant Chatel" de POA.
J’arrivais donc dans un état second dans le bureau de Monsieur Debray. Je dois à ce stade replacer les choses dans leur contexte : j’avais une vingtaine d’année et probablement l’air d’un galopin, ce qui en certaines circonstances me compliquait la tâche. Il me pria de m’asseoir et s’excusa de ne pas se lever :
- Une douleur, mais à 96 ans…
Le bureau était une vaste pièce qui n’avait pas dû bouger d’un iota depuis 1920 ; derrière le fauteuil du Patron étaient fièrement exposés sur une étagère surélevée quelque éléments de son uniforme de je ne sais plus quel régiment de dragons : casque et plastron rutilants, ainsi qu’un médailler copieusement garni et un sabre ou une épée, je n’ai jamais su faire la différence.
- Alors jeune homme cette 5 chevaux vous intéresse ? Mais pourquoi donc ?
Il me fallait improviser :
- Eh bien, je suis étudiant…
- C’est vrai que c’est économique, me coupa-t-il.
L’affaire s’engageait mal pour l’Hispano ; je recadrais donc et lui expliquais que je travaillais parallèlement pour une revue consacrée à l’histoire de l’Automobile. Il en fut tout étonné et se félicita que la jeunesse d’aujourd’hui ne se préoccupât point seulement de chienlit et de barricades. J’abondai un peu hypocritement, mais la fin justifiait les moyens.
Il avait visiblement un peu de mal à comprendre qu’on puisse s’intéresser à une voiture pour une autre raison que se déplacer mais, petit à petit, le courant passait mieux.
Peut-être souhaitez-vous les voir de plus près ? Ce pluriel, absolument capital, était prometteur : et comment ! Il avait appuyé sur la sonnette de son bureau et la nièce parut dans la minute.
- Geneviève, peux-tu me trouver Lucien ?
Geneviève revint cinq minutes plus tard avec Lucien, qui ôta sa casquette. Monsieur Debray me présenta à Lucien, dont je sus plus tard qu’il était l’homme à tout faire de la propriété - et ce n’était pas du luxe - :
- Lucien, voyez avec Monsieur pour la Citroën, et laissez-le regarder l’Hispano.
- Bien Monsieur.
Et, s’adressant à moi, le vieil homme :
- Revenez me voir à six heures dix, j’aurai cinq minutes à vous consacrer.
Je me confondis en remerciements et je suivis Lucien.
Le tour de la 5 HP fut vite fait : c’était un torpédo trois places à arrière pointu, le modèle « trèfle » emblématique de Citroën, fatiguée mais d’origine et complète : je n’aurai aucun mal à trouver un amateur. Je passais à l’Hispano. Lucien m’enleva la « bâche » et je pus la détailler : berline Kellner de belle allure, apparemment complète ainsi qu’on pourra le constater sur les photos jointes prises deux jours plus tard.
Elle souffrait d’un seul défaut : le panneau arrière avait été - soigneusement - aménagé d’une porte verticale ! Lucien m’en expliqua la raison : à la fin des années 1940, un décret obligea les entreprises de main-d’œuvre de plus de 100 employés à disposer d’un véhicule pouvant servir d’ambulance. Les établissements Debray avaient trouvé ce moyen de se mettre en conformité avec les règlements. La chose était attestée par le fait que les sièges arrière avaient disparu ainsi que le siège passager avant, ce qui permettait de glisser une civière.
Je questionnai Lucien sur son état mécanique. Il m’indiqua qu’elle n’avait pas tourné depuis une dizaine d’années, mais qu’elle ne souffrait d’aucune tare lorsqu’elle avait roulé la dernière fois, et qu’elle avait été vidangée, graissée et mise sur cales avant son long repos.
Je n’avais jusqu’alors jamais songé à acheter une ambulance, mais l’idée faisait son chemin. Restaient à régler quelques détails ainsi qu’un non-détail : quid de la seconde Hispano ?
Je questionnai Lucien qui en fut surpris :
- Ah ? il vous en a aussi parlé ? C’est étonnant : l’autre c’est la sienne, elle est comme neuve !
Je lui demandais où était « l’autre »
- Dans son garage, près de la maison principale, là-bas. Si vous revenez j’essaierais de vous la montrer, mais je serais bien étonné qu’il la vende…
J’étais dans l’état qu’on imagine lorsqu’à six heures cinq, je regagnais le bureau.
- Alors, jeune homme, vous êtes-vous décidé ?
- Sur le principe, mais nous n’avons pas parlé prix !
- C’est vrai ! combien m’en offrez-vous ?
- De la 5 chevaux, de l’Hispano ou des deux ?
- L’Hispano, c’est autre chose, commençons par la Citroën !
Il me fallait absolument ne pas être ridicule :
- Cent mille francs !
- Voyons, ça fait combien ?
Il était visiblement un peu perdu entre les nouveaux et les anciens francs... j’ajoutais :
- Cent mille anciens, mille nouveaux, si vous préférez.
Il fit une moue dubitative :
- Pas plus ?
- Vous l’avez dit vous même : elle est bien fatiguée !
- C’est vrai concéda-t-il et il regarda sa montre gousset : Revenez me voir lundi. Ah ! à tout hasard, apportez l’argent… des espèces n’est-ce pas ? Bonsoir Monsieur !
- Et pour l’Hispano ?
- Eh bien, je vais y réfléchir d’ici à lundi.
Ce qui valait congé. Sa nièce me raccompagna jusqu’au portail qu’elle ouvrit :
- Mon mari est chauffeur de taxi, il ne va pas tarder à rentrer…
Tout s’expliquait, mais l’affaire n’était pas gagnée : j’ignorais presque tout des relations que le Patron entretenait avec le mari de sa nièce et il avait au moins un week-end devant lui pour se renseigner s’il le voulait sur la valeur d’une Hispano… et probablement allait-il me demander de faire une offre le lundi.
Cette rubrique est aussi la vôtre !
Racontez vos anecdotes au Commandant Chatel par mail (thibautchatel@icloud.com), il se chargera de les publier. N’oubliez pas que pour « Souvenirs d’Autos » nous cherchons de l’anecdote, de l’humain, de l’humour, de l’émotion.
On oublie un peu l’arbre à came et le Weber double-corps… Et si possible, joignez à votre histoire des photos…. On adore ça chez POA !
Merci.
L’avis des Petits Observateurs
1 commentaire au sujet de « Souvenirs d’Autos (383) : Une Hispano ou rien (EP 2/4) »
Se connecter ou s'inscrire pour poster un commentaire
Belle maturité transactionnelle pour un gamin de vingt ans. J'étais beaucoup plus innocent et me suis fait bien souvent avoir.
Vivement la semaine prochaine, c'est follement excitant.
Vendredi 15 juillet 2022 à 11h58