Par Patrice Vergès. Produite de 1961 à 1970, l'imposante Jaguar MK X avait pour mission de s'attaquer autant aux Cadillac qu'aux Lincoln ou Rolls-Royce et autres Bentley notamment aux USA. Montez avec nous dans ce salon roulant animé par la mécanique de la Jaguar E.
5 m 13 de long, c'est long
Ce long vaisseau fuselé avale en silence l'asphalte en se dandinant sur ses suspensions souples. Sous l'interminable capot, le murmure ouaté du long 6 cylindres en ligne se fait à peine entendre dans le cocon de l'habitacle. Tout est délicatesse dans cette puissante berline dont les formes symbolisaient déjà la future XJ6 lancée en 1968. Succédant la grosse MK 9, la MK X avait pour mission de jouer les hauts de gamme au dessus des MK2 3,8 l ciblées plus sportive. Elle visait en priorité le marché américain où la marque de Coventry cartonnait depuis le lancement de la Jaguar XK 120. Face au récent succès de la Jaguar E aux USA, la marque au lion avait tant de mal à fournir qu'elle avait refusé d'en prêter une pour la série télé " Le Saint " avec Roger Moore.
Des dessous chic
Pour ce faire, ce haut de gamme avait reçu à l'arrière, la suspension à roues indépendantes de la Jaguar E et surtout sa mécanique dans sa version la plus affutée (Straight Port) avec 3 carburateurs livrant 265 ch SAE. Puissance capable de mouvoir ce magistral vaisseau de près de deux tonnes en ordre de marche à presque 200 km/h. En 1961, cette vitesse était surréaliste pour ce genre de voiture quand on sait qu'une DS 19 pointait à 150 km/h.
Non seulement par sa luxueuse présentation particulièrement celle de son habitacle tapissé de cuir et bois précieux, la MK X n'avait pas rougir face à une Bentley mais elle proposait des qualités dynamiques bien supérieures avec un freinage à quatre disques Dunlop très puissant, de bonnes suspensions indépendantes et surtout des performances exceptionnelles. Cerise sur le pudding, elle était proposée à un tarif deux fois inférieur à celui d'une Bentley. Enfin presque, à près de 40 000 francs de l'époque avec la boîte automatique optionnelle comme sur la version essayée.
40 000 francs en 1961, c'était le prix de trois Citroën DS 19, soit l'équivalent de 120 000 euros actuels. Malgré son prix compétitif qui n'en faisait pas pour autant la voiture de monsieur tout le monde, elle remporta un succès moyen, produite au total à 20 000 exemplaires en neuf ans dont 13 000 en version 3,8 l et le reste en 4,2 l sous le nom de 420 G (G pour grande). On aurait pu s'attendre à mieux mais certainement que son volume trop imposant et sa ligne trop lourde refroidirent la clientèle européenne aisée.
J'ai dû attendre 50 ans avant de l'acheter
On vous a déjà présenté la Jaguar XJ R Supercharged de "Jeep", heureux et récent possesseurs de cette superbe Jaguar. " Étant enfant, j'étais déjà passionné par l'automobile. Le plus amusant, c'est que mon père n'en avait pas et roulait à vélo ! Parfois, devant mes copains d'école, je mentais en leur disant que nous avions une auto. J'enviais mon oncle qui roulait toujours dans de grosses et belles voitures. Fasciné par la silhouette élancée de la MK X, je m'étais dit dans ma tête d'enfant, j'en aurais une un jour. J'ai dû attendre plus de 50 ans pour l'acheter ! "
En septembre 2017, cet amoureux des Jaguar la découvre dans une vente aux enchères. D'origine française, immatriculée en janvier 1963, elle disposait d'une boîte automatique Borg Warner à 3 rapport qui est un plus car les MK X de série avaient une boîte mécanique Moss bruyante et dont la première pas synchronisée n'était pas dans leur esprit. Les versions 4,2 l recevront une boîte totalement synchronisée plus agréable.
La classe à Dallas
" Elle affichait seulement 49 000 km au compteur mais on ne sait pas si c'est d'origine. Elle avait entièrement restaurée tant au niveau carrosserie, peinture chromes, mécanique tandis que tout l'intérieur avait été refait : sellerie et boiserie, moquette, etc. Elle était parfaite. Depuis, elle a été expertisée 50 000 euros " explique Jeep.
Comme toutes les Jaguar de cette époque, l'accès à bord n'est pas facile car si la MK X est longue, très longue, très large avec 1,93 m, elle est aussi très basse avec 1,38 m et il faut baisser la tête pour se glisser à l'intérieur. Contrairement à ce qu'on imagine, l'habitacle n'est pas si vaste. Il est vrai que l'immense capot prend toute la place partage avec l'interminable coffre de 700 litres qui peut accueillir une locomotive 421 R. Avant de faire piaffer les 265 chevaux, une MK X se visite comme le château de Versailles. L'interminable planche de bord en bois précieux vernis est parsemée de cadrans Smiths qui rappellent qu'un moteur sportif gavé par trois gros carburateurs se cache sous le capot surmonté du célèbre lion bondissant.
je veux du bois !
Boiseries qui se prolongent sur le portes et à l'arrière avec les sublimes tablettes basculantes incrustées dans le dossier de la large banquette avant dont chacune contient un cendrier. Les moelleuses banquettes tendues de cuir sont séparées par d'épais accoudoirs centraux permettant de voyager dans un grand confort. Comme nous l'avons déjà dit, la suspension tarée plutôt souple n'incite guère à la violenter même si sa mécanique dont on entend le rugissement gourmand des gros SU à seulement plus de 3000 tr/mn, aurait tendance à demander plus.
"Jeep" est un homme aux goûts éclectiques puisqu'il nous a fait écouter la musique épaisse du 6 cylindres Ford 3,1 l de la TVR qu'il vient d'acquérir pour se défouler en circuit car il a pratiqué la sport automobile dans sa jeunesse. Cette Jaguar suffit à son bonheur mais il ne dit pas que s'il trouvait une XK 140 à un prix raisonnable, il ne se laisserait pas tenter. Hélas, par rapport à la MK X, ces dernières ne sont plus vendues à des tarifs raisonnables !
Voir aussi : Que faut-il savoir avant d'acheter une Jaguar MK2 3.8L
L’avis des Petits Observateurs
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