Souvenirs d'Autos • Porsche

Souvenirs d’Autos (206) : La mystérieuse Porsche rouge

Une rubrique pilotée par le Commandant Chatel. Cette « chronique », qui va rappeler à certains leurs premiers émois, m’a été envoyée par Mike que je remercie.



 

Les années 90. Un quartier populaire.

Ma mère, monitrice d'auto-école, tenait sa petite affaire derrière laquelle nous habitions en famille. Je passais mes soirées après le collège, dans la pièce unique où se déroulaient les séances de code.

À 14 ans, j'étais globalement nul à l'école mais je connaissais le code de la route par cœur et je dessinais beaucoup de bagnoles…

À 15 ans je redoublais ma troisième et, fort de mes suffisances et mon talent certain de futur designer, je n’en foutais pas une.

Or à cette triste époque provinciale qu'était le règne du talon plat et des pulls Damart, l'arrivée d'une ravissante amazone blonde à lunettes noires dans une bruyante Porsche targa rouge 3.2 était des plus remarquées.

Particulièrement lorsque celle-ci, court vêtue et chaussée très haut, galbait la jambe pour s'extraire élégamment de sa machine qui dès lors n'était plus la plus convoitée. J'en ai vu pas mal lâcher leurs courses ou trébucher en contemplant le spectacle... On disait que la Porsche appartenait à son paternel, un soi-disant pilote de ligne que personne n'avait jamais vu…

Un soir de décembre, la voilà qui pénétra la boutique, accompagnée d'une consœur chaussée tout aussi haut, la peau noire et les courbes moulées dans une robe léopard.

Je fus surpris lorsque j'entendis ma blonde préférée, elle s’appelait Anetta, s'adresser à ma mère avec un fort accent slave : « Mon amie n'a pas permis français, elle conduire mais venir Sénégal, alors elle passer permis français! »

L'amie sénégalaise fût acceptée sur le champ.

Cet été là, ma mère m'avait inscrit, à un stage d'initiation au surf pour me dégourdir un peu. Et plutôt que de me laisser y aller seul en autocar, voilà qu'Anetta propose de m'y conduire ! Ma mère, volontaire mais peut-être un peu candide, accepta sans hésiter la proposition de sa très récente amie, et me voilà sonnant trois jours plus tard un beau matin à la porte cochère de la maison d'Anetta. Une de ces maisons bourgeoises comme il y en avait quelques-unes dans ma rue, aux volets toujours clos et qui m'impressionnaient un peu.

La porte cochère s'ouvrit et Anetta paru, rayonnante comme à son habitude, en tenue de plage dans ce garage sombre ou se trouvait au fond la 911, bâchée.

Nous découvrîmes la lourde couverture brune qui cachait le bestiau. Une fois dehors et découverte (d'ailleurs je n'ai jamais vu de toit sur cette Targa) je m'installais non sans taire mon enthousiasme. Du reste, je me souviens du trajet mené d'allure très tranquille, mais les mots furent rares, cheveux au vent, de par ma timidité et le bruit de l'engin, qui même peu sollicité s'avérait assez bruyant.

Je déballais de temps à autre une ineptie pour meubler les vides, ne parvenant pas à fixer la route, les yeux irrésistiblement attirés par les cuisses de ma conductrice, dorées par un franc soleil de juin.

Puis, un échange malheureux survint, moi interdit et elle fière et conduisant d'une main, nous deux criant pour nous entendre dans le vacarme:

- Alors comme ça ton père est pilote ?

- Non, moi conduire !

- Non je dis, ton père il pilote des avions ? Il fait l'avion, l'avion ?!

- Non lui pas faire l'avion, lui pilote !

- Oui c'est bien ce que je disais, il est pilote. Et il te prête sa voiture ? C'est gentil ça...

- Lui très gentil, mais voiture moi !

- Alors il te l'a offerte ? Donnée ?

- Non moi ! Lui pas donner argent !

- Mais tu m'as dit que tu étais étudiante, tu l'as payée comment ?

À ces questions impertinentes elle coupa court, très agacée, et je dû me contenter du son rauque du moteur comme unique réponse jusqu'à la fin du trajet. Il fallait bien l'admettre: j'avais un don pour parler aux filles, bravo, quel con !

En outre l'expérience du surf ne se révéla guère plus concluante que les autres, tous les mioches parvenant au moins à se hisser à genoux sur leur planche, tandis que moi ce n'était que plouf, plouf et re-plouf sur quelques centimètres de mousse...

18h sonna la fin du stage. Comme convenu, j'allai rejoindre Anetta devant la cabane à frites principale mais elle n'y parut point. J'ai attendu, parcouru la foule puis m'en suis voué aux sauveteurs. Juché sur le marche-pied de leur Lada Niva, j'ai sillonné l'immense plage à sa recherche, avant de laisser tomber, prétextant l'avoir aperçue, car j'avais honte et m'imaginais les gens se moquer de ce grand con de quinze ans cherchant sa maman sur le 4x4 des CRS !

J'aurais pu téléphoner à la maison depuis un resto mais toujours complexé je me suis résolu à rentrer par mes propres moyens, marchant le pouce levé le long de la route brûlante. C'est une famille qui m'a ramassé et ramené.

Une fois rentré, je n'ai rien dit à mes vieux, j'ai affirmé que tout c'était bien passé. Et on m'a cru je pense, il n'y a pas eu d'interférences avec la Sénégalaise qui continuait ses cours de conduite.

Dès lors, je l'ai guetté des nuits durant assis dans la pénombre du bureau éteint, par la vitrine. Je ne l'ai aperçu qu'une fois bien après, passagère d'un gominé à lunettes fumées dans la Porsche rouge.

Deux mois plus tard, il y a une descente de flics dans la rue. Les bleus, toutes sirènes hurlantes, ont forcé la porte cochère mais il n'y avait personne. La Porsche est partie sur un plateau de la fourrière et on n’a plus jamais entendu parler d'Anetta ni de sa copine Sénégalaise, et personne n'a plis jamais évoqué cette histoire, comme si ça n'avait jamais existé, et la vie a repris son cours monotone dans ce morceau de ville chuchotant...

Cette rubrique est aussi la vôtre !

Racontez vos anecdotes au Commandant Chatel par mail (thibautchatel@icloud.com), il se chargera de les publier. N’oubliez pas que pour « Souvenirs d’Autos » nous cherchons de l’anecdote, de l’humain, de l’humour, de l’émotion.  On oublie un peu l’arbre à came et le Weber double-corps… Et si possible, joignez à votre histoire des photos…. On adore ça chez POA ! Merci.

 

 

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Vendredi 14 décembre 2018

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