Produite à 47 000 exemplaires entre 1960 et 1973, le coupé Volvo 1800 S a été peu diffusé en France à cause de son prix trop élevé et du manque d'image sportive de la marque suédoise. 50 ans plus tard, c’est devenu un classique.
Titre un peu facile je l'avoue en forme de clin d'œil à la série télévisée " le Saint" des années 60 avec Roger Moore dans le rôle de Simon Templar qui roulait au volant d'une Volvo P1800 au long des 118 épisodes. Titre dérivé de l'expression " En voiture Simone " où je me sens plus légitime pour avoir connu Simone Des Forest pilote automobile d'avant-guerre dont les exploits automobiles avaient engendré cette expression populaire.
D'abord un minimum d'histoire avant d'évoquer la 1800 S aussi neuve qu'une neuve de Philippe. Le constructeur suédois Volvo pensait déjà depuis longtemps produire un coupé sportif destiné surtout à la clientèle US. Réalisé sur la base de la berline 122 Amazon, ce coupé fut dévoilé au salon de Bruxelles 1960. Dessiné chez l’italien Frua par un styliste suédois indépendant nommé Pelle Peterson, le fils du créateur de la Volvo 444, ce coupé 2+2 offrait une silhouette terriblement séduisante. Elle se caractérisait par un interminable capot, une calandre gourmande inspirée par celle des voitures de course d’alors, un original jonc chromé latéral jaillissant vers l’avant et une légère amorce d’ailerons arrière barrés de feux horizontaux.
Mécanique de la berline 122
Mécaniquement, elle était très proche de la berline 122 dont elle reprenait le soubassement et sensiblement la mécanique dans sa version la plus puissante. Le bloc B18 peint en rouge 4 cylindres de 1800 cm3 alimenté par deux carburateurs délivrait tout de même 100 ch SAE (90 DIN) ce qui n’était pas grotesque face à la puissance d’une MGA ou TR3 de cylindrée équivalente. Le P1800 innovait par des freins à disque à l’avant et un overdrive électrique optionnel sur le quatrième rapport. Sous une carrosserie mieux profilée, cette mécanique autorisait une vitesse de pointe de plus de 165 km/h.
Au fil du temps, le P1800 évolua en suivant les améliorations des divers modèles de la firme de Göteborg qui s’était investie en rallye avec sa 122 S. Construite en Angleterre son montage fut d'abord sous-traité chez Jensen. Mécontent de ce carrossier, Volvo rapatria son montage en Suède dès 1963 en la rebaptisant S pour Suède même si la lettre de P (Personvagn) lui colla à la carrosserie jusqu’à la fin de sa vie.
Au fil des années, elle passa successivement de 100 à 130 chevaux SAE grâce au montage du deux litres de la 144 et de l’injection Bosch tout en adoptant son train roulant mieux maîtrisé. Enfin en 1972 pour relancer ses ventes déclinantes, elle évolua en version ES (Estate) sorte de magnifique break de chasse qui lui redonna avec une seconde vie jusqu’en fin 1973 où 8077 exemplaires se rajoutèrent aux 39 414 exemplaires du coupé 1800.
"J'ai appris à coudre à la machine"
Il y a quatre ans que Philippe a acheté sa 1800 S millésime 1965 au moteur poussé à 96 ch DIN (108 ch SAE) importée de Californie. " Elle était saine et présentait bien mais restaurée à l'américaine. Quand j'ai décapé la carrosserie, je me suis rendu compte qu'elle avait été bouchée à coups de polyester. On m'avait dit, une Volvo, c'est indestructible. Hélas, pas la mienne. Le moteur était mort, la boîte était à refaire et il manquait des dents dans l'overdrive ! ". Philippe a entièrement déshabillé sa 1800 S, refait la carrosserie (voir photo), le moteur, la boîte, l'overdrive, les freins, la direction, le pont, tous les silentblocs. Il a même appris à coudre à la machine pour refaire les sièges. " Chez Volvo, on peut retrouver toutes les pièces soit chez le constructeur, soit en Angleterre. C'est bien, mais hélas, elles sont hors de prix avec, par exemple, 54 euros le minuscule clip de maintien du pare-soleil" se plaint-il. Après deux années de restauration, repeinte en rouge, sa 1800 S semble aussi neuve qu'en 1965 où elle était affichée en France à 24 475 francs, soit sensiblement l'équivalent de 75 000 euros actuels.
Admirable planche de bord
Une 1800 S attire aujourd'hui surtout pour sa silhouette ravissante. Leitmotiv habituel lorsqu'on essaie une voiture des sixties, sa compacité étonne comparée au parc roulant actuel. Avec 1,29 m de haut, il faut vraiment dégringoler dans l'habitacle pour prendre place au volant. Il étonne avec une visibilité aussi restreinte que dans une moderne à cause des sièges positionnés très bas s'opposant à une ceinture de caisse très haute. L'œil est enchanté par le dessin original des poignées de contre-portes et des beaux sièges semi-intégraux où se plaque le frein à main à gauche du conducteur comme toutes les Volvo de cette époque et le court levier de vitesses. Il est carrément fasciné par cette admirable planche de bord en métal chromé parsemée de nombreux cadrans et le grand volant à deux branches trouées étonnamment vertical imposant une position de conduite vintage.
Mon plaisir, c'est d'abord de restaurer
Hormis une sonorité aux notes graves due aux deux gros carburateurs SU et à un échappement spécifique à deux sorties, le 1800 cm3 qui privilégie la robustesse et la souplesse ne distille aucune velléité sportive même si le millésime 1965 frôlait les 170 km/h. Cette voiture conçue il y a près de 60 ans explique sa direction à boitier au rayon de braquage impossible, avouant une pesante imprécision tandis que l'essieu arrière tout ce qu'il y a de rigide se dandine volontiers sur mauvais revêtements. Sous sa livrée évocatrice de sportive, la 1800 S n'était pas une véritable voiture de sport comme on l'imaginait à l'époque.
" J'avoue que je m'attendais à une voiture plus sportive. Mais elle est agréable surtout sur les longs parcours sur bonnes routes. Mon plaisir est de restaurer pas de posséder. Lorsque une voiture est achevée de restaurer, elle perd de l'intérêt à mes yeux" reconnait ce passionné qui conduit aussi un rare cabriolet Simca Océane dessiné par Facel qu'on s'est promis d'essayer dans quelques mois pour POA.
Avant de se quitter, un dernier regard sur cette séduisante planche de bord et sur son esthétique racée qui engendre une sensation de vitesse même à l'arrêt. On comprend que Roger Moore réputé pour son goût exquis ait été à titre personnel propriétaire d'un coupé 1800 S à la fin des années soixante.
L’avis des Petits Observateurs
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