Par Patrice Vergès. Dans des années 70/80, il n'y avait pas une jolie femme qui ne rêvait pas de posséder une Autobianchi Abarth 70 HP de préférence noire. POA en a retrouvé une strictement d'origine pour vous.
En ouvrant la porte du jardin de René, je n'en ai pas cru mes yeux face à ce gros jouet. Les A112 sont devenues excessivement rares sur nos routes aujourd'hui et ma mémoire saturée avait oublié que cette voiture était aussi minuscule (3,26 m) surtout en teinte noire encore plus amincissante, couleur qui est la terreur des photographes. Comment faisions-nous pour rouler dans des voitures aussi petites ?
Une Fiat de luxe
Produite plus de 15 ans de 1969 à 1986, l'Autobianchi A112 a connu un honorable succès commercial avec plus de 1,4 millions d'exemplaires fabriqués en sept séries. Dès 1971, une version plus sportive siglée Abarth épaula le modèle normal d'abord en version 1000 cm3 58 ch puis 1050 cm3 portée à 70 chevaux. Autobianchi était une petite marque satellite de Fiat dont usait le géant italien pour tester certaines technologies en plus petite série. Ainsi la Primula proposa la traction avant et le moteur transversal six ans avant que Fiat ne l'adopte sur sa 128. Et par son architecture, l'A112 traction avant préfigurait la future 127 née deux ans plus tard. Plus luxueuses que les Fiat et moins communes, les Autobianchi bénéficiaient d'une image plus "classieuse". La pimpante A112 supplanta la Mini surtout parmi la clientèle féminine qui adora sa petite bouille sympa, sa latinité, sa modernité, sa praticité (hayon) sa présentation bien plus raffinée et sa maniabilité. D'ailleurs pour mettre en avant cette meilleure image, Fiat rebaptisera Lancia, l'Y10 qui succéda à l'A112.
Je rouille pour vous
L'A112 de René est une 5 eme série de 1980 et c'est l'une des plus désirables à mon avis car elle affiche encore une ligne sobre perdue sur les dernières séries à gros boucliers tout comptant 5 rapports dans sa boîte qui manquaient cruellement aux précédentes.
"En plus, elle rouille beaucoup moins que celles qui ont suivies " précise René dont c'est la 5eme A112. " J'ai acheté la première, une 903 cm3 en 1969 de couleur bleu vendue alors par le réseau Citroën (né des accords Fiat Citroën qui firent long feu) puis j'ai eu des versions Abarth". Passionné de voitures depuis sa tendre enfance, René a appris à déraper sur la Traction 1935 que lui avait donné sa mère puis après avoir usé plusieurs Fiat 850, il a participé à quelques rallyes à la fin des sixties avec une Alpine Berlinette 1100 ex-usine à caisse allégée. " J'ai commencé par un tête à queue dès que j'ai pris le volant, c'était pointue à piloter ".
René est tombé amoureux de cette petite bombinette italienne qu'il réservait à son épouse. Puis en 2001, il a découvert cette 70 HP de 1980 qui ne totalisait que 29 000 km au compteur. C'est rare car les A112 surtout en version Abarth ont souvent connu des destinées difficiles. Sur les 141 000 fabriquées, beaucoup ont disparu emportées par la rouille ou par la course. Grace à la Coupe crée en France par son dynamique importateur André Chardonnet, l'Abarth connut une belle carrière en rallye. C'était une excellente voiture école appréciée par les pilotes débutants. Elle révéla particulièrement les rallymen François Delecour et Attilio Bettegua.
Une boule de nerfs
70 ch ce n'est pas beaucoup mais la A112 ne pesait que 675 kilos ce qui générait un excellent rapport poids-puissance. Elle frôlait presque les 160 km/h surtout les versions essayées par la presse qui était soigneusement préparée (gonflées même) par Chardonnet. Elle était animée par un moteur magique. Pourtant c'était un bloc assez ancien dérivé de celui de la Fiat 600. Revu par l'ingénieur Lampredi qui avait fait ses classes chez Ferrari, il était devenu une petite merveille de mécanique. Vif, très musical appuyé par un pot Abarth, puissant mais pourtant souple, économique et incassable. Du pur bonheur malgré un bruit de distribution envahissant au ralenti.
Sur petites routes, l'Autobianchi est un réel enchantement, hyper maniable et très vive dans ses réactions grâce à sa compacité avec un gros compte-tours qui monte à la vitesse de la lumière. Suspensions raides, bruits mal filtrés, mécanique envahissante, c'est une voiture d'un autre temps mais ô combien vivante comparée à nos montures de 2017. Sportivement, elle devenait pointue, mal assurée sur ses roues étriquées, un train avant perfectible, ses voies étroites et son empattement ultra-court. Mais elle était follement amusante et sélective. Bien pilotée, elle faisait des merveilles surtout en descentes où elle signait des chronos assez surprenants.
Même les autocollants sont d'origine
Bien sûr dans l'habitacle envahi de plastiques durs, les coudes se frôlent. "Cette version a des sièges plus confortables " explique René qui tient fermement le petit volant siglé au scorpion de Carlo Abarth dont c'était le signe zodiacal. " J'aime sa maniabilité et son ambiance sonore. J'ai parcouru avec plus de 25 000 km en participant de petites sorties d'anciennes sans problème. Tout est d'origine comme la peinture et même les autocollants ! Mais je passe mon temps à surveiller la carrosserie et la première tâche de rouille. Si on ne l'endigue pas, c'est trop tard !
Bien évidemment René fait partie de l'Autobianchi Club de France crée il y a 16 ans par Vincent de Fresquet (http://www.clubautobianchi.fr/) qui se démène beaucoup pour que ces voitures vivent. Ce club qui compte 120 membres organise des sorties à laquelle René participe activement. "Les Abarth devenant rares, les prix montent mais j'y tiens trop. Je la garde ! "
L’avis des Petits Observateurs
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