Par Patrice Vergès. La Renault 5 Turbo c'était une Renault 5 pas tout à fait comme les autres. Son moteur avait quitté l'avant pour l'arrière à la place de la banquette pour en faire une extraordinaire machine à gagner les rallyes entre 1981 et 1986.
A la fin des années 70, la Renault 5, cheval de bataille de la firme au losange, devait représenter Renault en compétition. Mais la version Alpine mue par un 1400 cm3 de 93 ch manquait de puissance face une concurrence beaucoup plus musclée. D'où l'idée de développer une Renault 5 très spéciale animée par un moteur central turbocompressé. Imaginée par l'ingénieur Michel Têtu, motorisée par Bernard Dudot, la Renault 5 Turbo fut dévoilée fin 1980.
De la Turbo à la Turbo 2
Son moteur 1400 cm3 gavé par un turbocompresseur Garrett délivrait l'impressionnante puissance, pour l'époque, de 160 ch. Et surtout son implantation centrale comme sur les voitures de compétition liée à une suspension arrière triangulée offrait à la Renault 5 Turbo des qualités dynamiques que ne pouvait livrer une traction avant.
Dans des versions de plus en plus puissantes, elle devint une arme à gagner les rallyes. La version civile construite en petite série pour homologation chez Heuliez coûtait une véritable fortune : 115 000 francs 1980 (environ 60 000 euros) pratiquement le prix d'une Porsche 924 Turbo. Avec ses deux strictes places, la Renault 5 Turbo s'adressait à une clientèle étroite de passionnés expliquant que seulement 1690 furent produites en deux ans.
Renault décida d'en extrapoler une version plus commerciale qui abandonna les coûteux éléments de carrosserie en aluminium au profit de la classique tôle et son intérieur au design spécifique signé Bertone pour celui d'une classique Renault 5 Alpine. Fin 1982, la Turbo 2 aux prix abaissé de 25% (95 000 francs) voyait le jour en relançant ses ventes puisque 3167 Turbo 2 virent le jour jusqu'en 1986.
"Je dessinais des pièces de moteur "
Adolescent, Lionel ne dessinait pas des voitures sur son cahier d'écolier mais des pistons, des pipes d'admission. "J'ai commencé à gonfler ma Mob puis mon 50 Suzuki qui pointait à 115 km/h en marchant plus vite que les 125 ! "
En 1980, trois ans avant d'avoir son permis, il achète sa première voiture. Une R12 TS qu'il prépare autant au niveau mécanique qu'esthétique. Puis carton rose en poche, c'est plusieurs Renault 12 Gordini préparées dont la plus récente qu'il a conservée délivre 156 chevaux contre 112 d'origine. Hyper doué en mécanique et passionné par l'admission d'un moteur, en 1987, il achète une Alpine A310 4 cylindres sur laquelle il adopte un turbo. Il nous montre fièrement son petit bolide rouge tapi dans son garage et dont le 1596 cm3 turbocompressé avoue 195 chevaux au banc d'essai !
Prépa moteur
"Lorsque la Turbo a vu le jour fin 1980, je m'étais dit, j'en aurais une. J'ai du patienter jusqu'en 1998 où j'ai trouvé cette Turbo 2 de 1983 couleur bleu marine 403 qui ne totalisait que 50 000 km. Elle était en bon état mais j'ai été un peu déçu au niveau puissance comparée à mon Alpine". Lionel adopte un arbre à cames plus méchant, augmente la pression du turbo, améliore le refroidissement avec un gros échangeur en alu, revoit l'injection, discipline où il est plus pointu que bien des préparateurs, augmente le débit d'essence et monte un pot Devil plus libéré.
La Renault 5 Turbo nous attend pour un petit galop d'essai. Petite comme toutes les voitures des seventies du moins coté pile et montreuse coté face avec sa croupe callipyge posée sur d'épais pneus Michelin TRX (une petite fortune pièce) de 220 de large contre 190 à l'avant. Lorsqu'on conduisait une Renault 5 Turbo en prenant la corde en virage, il ne fallait jamais oublier cette différence importante de largeur des voies. J'ai aussi le souvenir d'un voyage de nuit en Turbo 1 dont l'échappement lâchait des flammes en décélération en illuminant de rouge le visage heureux de l'automobiliste qui me suivait.
C'est du brutal !
Démarreur actionné, le pot Devil laisse échapper un son épais qui ne doit pas en faire l'idole du voisinage. À l'intérieur on retrouve l'ambiance d'une Renault 5 de l'époque. Dans les oreilles, le 1400 cafouille et éructe grave et pousse gentiment tandis que la petite aiguille folle de pression du turbo reste en dehors de la zone rouge. Le moteur chaud, Lionel profite d'une ligne droite pour lâcher les chevaux. Des souvenirs reviennent à ma mémoire puisque Renault m'avait prêté une Turbo 2 une quinzaine de jours en 1983. Le sifflement du turbo, les brefs psschiitt du waste-gate, ce train avant qui se cherche un tantinet à l'accélération. Mais celle du service presse quoique bien préparée ne fonctionnait pas comme celle de Lionel. J'avais même piloté une version 260 chevaux de Bruno Saby à Charade au moteur plus rempli et moins violent lors de l'action du turbo.
Ici, c'est un vrai coup de pied au cul pendant que le manomètre du turbo s'envole à la vitesse de la lumière et il faut déjà changer de rapport car l'aiguille du compte-tours explose vers les 7000 tr/mn. Une véritable catapulte qui accélère le paysage autour de nous. Sa monture doit dépasser les 200 chevaux !
J'ai eu un mal fou à faire sourire Lionel lorsqu'il posait devant sa voiture. Là au volant, il avait la banane. Ne change pas Lionel !
L’avis des Petits Observateurs
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