Par Patrice Vergès. Si Lancia a produit des voitures sublimes en particulier des coupés, la firme italienne a commis aussi quelques voitures esthétiquement ratées. Dire que la Trevi était moche serait tout aussi excessif que de prétendre qu’elle était belle. Mais il y a un peu de ça quand même !Certains adorent cette originale planche de bord, d’autres, au contraire la détestent ! Dans tous les cas, c’était un nid à poussières.
De profil, la Trevi (Trois Volumes) souffrait d’une custode trop verticale et d’un arrière trop bref dans le contexte de l’époque
En 1969, Fiat a été contraint de racheter Lancia en faillite pour la somme symbolique d’une lire l’action. Le géant italien craignait que la vieille marque italienne tombe entre les mains de Ford ou BMW souhaitant s’implanter en Italie. Avec une production ayant chuté autour de 30 000 voitures par an, les Flavia et Fulvia se vendaient mal. Fiat ne savait pas où il devait situer Lancia réputée pour sa technologie avant-gardiste car dans son esprit, elle était trop proche de la philosophie de Citroën. Firme avec laquelle Fiat était alors associée depuis 1968 et dont de grands projets devaient voir le jour. Projets qui se soldèrent par un énorme Pschittttt comme aurait dit Chirac.
Beta 2 volumes
La Trevi était dérivée de la Beta 2 volumes dont la silhouette trop utilitaire ne séduisit pas les Lancistes. Sa mauvaise visibilité arrière fut très critiquée
C’est pourquoi il y a beaucoup de l’esprit Citroën dans la Beta conçue entièrement chez Fiat qui fut présentée au salon de Turin 1972. Elle avait même failli adopter la suspension pneumatique de la GS/CX et on peut dire que sa carrosserie 2 volumes était un mix entre celle de la GS, future CX et concept Pininfarina que tout le monde pompa. La Beta adoptait la traction avant et la motorisation transversale 1600 cm3 empruntée à la Fiat 132. Ce joli double arbre était accolé à une nouvelle boîte transversale étudiée en commun avec Fiat et Citroën pour les utilitaires C25 et Ducato avant d’équiper pendant près de 20 ans toutes les voitures du groupe PSA et même des Talbot ex Simca. Et notre Beta. On y arrive p’tits gars !
On ne peut pas dire que la Beta fut fabuleusement accueillie par tous les Lancistes qui restèrent froids face à sa carrosserie utilitaire à deux volumes pas du tout dans l’esprit Lancia. Ajoutez à cela une finition déplorable liée à une fabrication calamiteuse. Le directeur général de Lancia dut se battre pour faire changer au dernier moment la boulonnerie du moteur gravée Fiat. Bref, pour les Lancistes, c’était une Fiat moins belle qu’une Fiat. Mais au fil des ans, la Beta améliora sa fabrication, gomma ses défauts (2eme série) et tenta de retrouver l’esprit de la marque prestigieuse en adoptant une calandre néo-rétro qui s’adapta fort mal à la face avant. Mais passons !
Opération tronçonnage
Mais un sondage auprès de la clientèle apprit que 50% des clients n’acceptaient pas la ligne à 2 volumes qui n’avait même pas le mérite d’offrir un hayon. D’où l’opération tronçonnage en 1979 consistant à couper le pavillon derrière la porte et offrir un porte à faux arrière pour la transformer en 3 volumes. Pour masquer l’épaisseur de la custode arrière coincée entre le pavillon trop incliné et la glace de porte trop verticale, on adopta une grille triangulaire jouant le rôle d’un court troisième vitrage plein. Pas idiot ! Mais on ne peut pas dire qu’avec son pavillon trop court, sa malle trop brève dans le contexte de l’époque, sa ligne trop cassante et trop lisse, sa caisse trop haute, la Trevi (tre volumi) mérita le 1er prix du concours de beauté. Opération beaucoup moins réussie que sur la Prisma qui était une Delta à 3 volumes. Rassurez-vous, il y a plus moche avec la planche de bord surnommée « le gruyère »
« Le gruyère ou le nid à poussières »
C’est cette année la que les Beta et Trevi adoptèrent une nouvelle planche de bord composée d’une multitude de trous (29 !) signée du designer indépendant Roberto Bellini. Pas vraiment une bonne idée. Le directeur de Fiat Auto poussa une énorme colère en la découvrant et demanda qui était le responsable chez Lancia qui avait avalisé une telle horreur. Après une enquête auprès de la direction générale de Lancia, il ne fut trouvé aucune note écrite qui l’autorisait. Courageux mais pas téméraire ! Cette planche de bord fut surnommée « le gruyère » par Fiat et « le nid à poussières » par la clientèle.
La Trevi produite 5 ans seulement à près de 37 000 exemplaires ne joua aucun rôle dans le redressement spectaculaire de la marque Lancia dont les ventes grimpèrent à 300 000 exemplaires au milieu des années 80. C’était grâce à son engagement sportif inspirés par des hommes exceptionnels comme Cesare Forio et surtout Vittorio Ghidella qui avait tout compris. Quelques années plus tard, son éviction marqua le début de la descente aux enfers de Lancia et Fiat dans la foulée. On sait, hélas, ce qu’il en est de l’avenir de Lancia comme l’a expliqué récemment Sergio Marchionne. Les mots de l’avvocato Giovanni Agnelli, lors du rachat de Lancia par Fiat, raisonnent de nouveau étrangement à la mémoire « Fiat plus Lancia ne sera jamais aussi fort que Fiat sans Lancia »
En 1979, Lancia adopta une calandre néo rétro destinée à affirmer la personnalité de la voiture
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