Par Patrice Vergès. En janvier 1976, il y a juste 40 ans, mon premier essai automobile était publié dans un hebdomadaire local. Depuis, j'ai dû conduire autour de 1500 voitures plus 150 à 200 anciennes pour plusieurs magazines. L'occasion de revenir sur 40 ans d'essais et d'évolution du monde automobile...
En 1976, le PAF (Paysage Automobile Français) n'offrait évidemment pas le même visage que celui de 2016. Mais il était devenu très différent, en peu de temps, de celui de 1973. Juste avant la crise de l'énergie, la vitesse était encore libre, le prix du carburant raisonnable et la route était un véritable espace de liberté doublé d'un champ de bataille dont il fallait sortir vainqueur. D'ailleurs, on disait alors, "prendre la route"....
Déjà en 1976, les radars Mesta en forme de barbecue blanc se cachaient sous le hayon des Renault 12 de la gendarmerie, le prix du super avait explosé à 1,90 francs le litre (autour de 2 euros) et nous avions perdue notre joie de vivre en entrant dans " la crise". Sans imaginer qu'elle serait toujours une compagne de vie, quarante ans plus tard. C'était aussi le début du désamour de la bagnole.
Une Simca Rallye 1
Mon premier essai publié, la Simca 1000 Rallye 1 était loin d'être une nouveauté puisqu'elle avait vu le jour fin 1971. Issue de la lointaine Simca 1000, elle avait le mérite d'être proposée à un prix compétitif correspondant à environ 15 000 euros. Ses 60 chevaux et ses 148 km/h n'en faisaient pas un foudre de guerre sous la livrée agressive d'une sportive de l'époque ; capot noir mat, bandes latérales, stickers. Mais, elle était amusante à conduire avec son moteur arrière assez vif. Une architecture largement démodée datant des fifties car la traction avant s'était déjà imposée un peu partout.
Sauf chez les Japonais qui proposaient encore des propulsions à moteur avant et essieu rigide à l'arrière sur leurs petites cylindrées. Les Japonaises, de ces années là, étaient mieux équipées que nos voiture françaises, plus pimpantes et plus soignées, plus belles et parfois moins chères. En revanche, leurs qualités dynamiques étaient dépassées et leurs performances souvent décevantes. J'ai le souvenir d'un virage qui n'en finissait pas de finir au volant d'une Mazda 818, affublée de 4,5 tours de démultiplication. Chaud ! Le coupé Toyota Life Back avait de allure, copiée sur la Lancia HPE. En me faisant doubler par une camionnette en sortie de Saint Etienne, j'ai bien douté des 73 ch Din de son 1200 cm3. L'importateur français avait rajouté 20 chevaux sur le catalogue, annoncée sur d'autres marchés. Avec 53 ch, c'était loin d'être un avion de chasse.
La première japonaise moderne fut la gracieuse Datsun Cherry qui adopta la traction avant dès 1976. Si elle était plus sexy que sa concurrente la Renault 5, son habitabilité et ses sièges étaient étudiés pour des gabarits de 1,60 m et sa radio de série fonctionnait, comme toutes les japonaises, uniquement sur les ondes courtes.
"Combien vous faites de kilomètres ?"
Je ne savais même pas que les services de presse existaient. C'étaient les concessionnaires qui me prêtaient les voitures et, après tout, ce n'était pas si mal. J'avais parfois droit au peu diplomatique " J'espère que votre article sera bon ? " ou " Combien de kilomètres vous faites ? Quand j'en parcourais beaucoup dans le week-end, on me faisait passer à l'atelier pour débrancher le câble du compteur. Souvent les plaques de voitures étaient en W garage, qui m'a valu des tonnes d'histoires avec les forces de l'ordre, réservé uniquement aux garagistes.
En fait, c'est le service presse de Ford qui, en découvrant une de mes publications, me proposa un prêt de Capri 3 litres rouge à boîte automatique. Ah, pour être belle, elle était belle avec sa silhouette agressive ! Déjà, ses 138 chevaux patinaient sur le sec à l'accélération. Lors de l'essai, la neige tomba et la belle Capri ne voulu rien savoir en balayant la route enneigée de l'essieu arrière sans avancer d'un centimètre. Nous avons donc essayé le train !
Les voitures n'avaient pas d'électronique avec ce qu'il y avait de bien mais aussi de mauvais, au plan de la motricité, l'ABS n'existait pas, l'injection était encore rare et les directions assistée peu fréquentes. Dépourvue de direction assistée, la CX 2000 me déçut terriblement car, elle se manœuvrait comme un camion.
La percée du diesel
Jusqu'à l'avènement de la Golf, les moteurs diesel étaient peu excitants, lents, pas nerveux et très sonore. La VW Golf diesel fut un véritable événement puisque pour la première fois, un petit diesel de 1500 cm3 marchait aussi fort qu'un 1100 essence de 50 ch. Et surtout, il offrait le même plaisir de conduite, avec de montées en régime réactives et un bruit raisonnable. En 1978, la Citroën CX 2500 D fut aussi un événement car elle apportait le confort, la sécurité et une vitesse de pointe (155 km/h) enfin honorable à ce type de véhicule. Enfin, quelques mois plus tard, c'est Peugeot qui démocratisa le turbo avec la 604 GTD (80 ch) qui proposait, pour la première fois, des relances digne d'une bonne essence.
Parmi les voitures qui m'ont impressionné en cette fin de décennie, notons la Simca 1308 élue "Voiture de l'Année" qui était vraiment exceptionnelle, le coupé Honda Accord démontrant qu'il fallait devoir compter avec la technologie japonaise, la Saab 99 EMS à injection, la musicale BMW 323 et quelques autres.
Et les plus mauvaises
Parmi les désillusions, citons la Skoda 105 L à moteur arrière dont la tenue de route m'épouvanta tant, que je la fis contrôler sur un pont élévateur pour vérifier si les triangles du train avant ne se dévissaient pas, l'imposante Toyota Crown diesel catapultée par un diesel de 55 ch, me valut d'être déposé en accélération par une fusée nommée Ami 8. La Datsun Bluebird 180 B à l'essieu arrière très indépendant, était du genre vicieuse. Enfin, le coupé Datsun Sunny 120 Y était bien joli avec sa silhouette très agressive. Mais sur routes mouillées avec ses pneus tubeless de 12 pouces portés par un essieu à lames, il patinait plus qu'il ne roulait. Enfin, au volant d'une Innocenti sur base Mini, j'ai cru que la suspension était une option dont la voiture n'était pas équipée. Au fil des essais, je me suis rendu compte qu'essayeur auto, c'était un grand bonheur composé de petits malheurs. La suite de ces aventures, bientôt, si vous le voulez bien.....
40 ans d'essai automobile (deuxième partie ici)
40 ans d'essais automobile (troisième parties ici)
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