Les Petites News

La mobilité demain selon Joël de Rosnay


Carte Blanche à 

Joël de Rosnay




 Nos rapports à la mobilité  et à l’énergie dans les années venir

Tout d’abord, il ne faut pas oublier que la mobilité concerne bien sûr les transports, mais aussi et surtout les hommes, les idées, le numérique et l’énergie. Pour moi, le concept de mobilité au sens large va nous permettre d’entrer dans ce que j’appelle « la société fluide », c’est à dire une société fondée sur l’échange, le partage et les rapports de flux plutôt que sur les rapports de force.

Cette société fluide que j’ai décrite dans mon dernier livre « Surfer la vie » est une société fondée sur le préfixe « co » : Covoiturage, Copartage, cohabitation, Coéducation et Communication. L’aspect collaboratif sera amplifié et renforcé par les réseaux sociaux et l’internet en général, c’est à dire la communication de personne à personne et l’extension générale dans la société de ce que l’on appelle le « pair à pair » (Peer-to-peer en anglais, ou P2P) qui a commencé avec la musique et la vidéo et qui aujourd’hui va se prolonger par tous ces échanges, ces partages, avec le préfixe « Co » et bien entendu ça touchera la mobilité et les énergies.

Je pense en effet que la mobilité du futur sera à la fois une mobilité collective avec de nouveaux systèmes de transport collectifs moins polluants, moins bruyants, plus rapides et plus flexibles. Je pense que nous irons vers une mobilité individuelle de type modulaire, utilisant des véhicules électriques ou hybrides rechargeables capables de parcourir de longues distances grâce à des prolongateurs d’autonomie et des batteries toujours plus performantes. Mais n’oublions pas que les véhicules légers de mobilité auront une grande place dans nos sociétés : il y a aujourd’hui plus de 180 millions de vélos électriques en Chine et le secteur des deux-roues et des quadricycles est promis à un bel avenir.

Aujourd’hui, la voiture électrique ne connait pas encore le succès qui lui est promis car elle est encore chère et son autonomie est limitée. Mais elle est déjà très pertinente pour des flottes municipales, professionnelles ou d’autopartage, et il ne faudrait pas sous-estimer son potentiel incroyable en terme de stockage de l’énergie. 

La voiture électrique est une batterie sociétale mobile qui peut être à la disposition de tous, même si elle n’a qu’un propriétaire. Une voiture reste à peu près 95 % de son temps en stationnement ; avec le système qu’on appelle V2G (pour « Vehicle to Grid »), la voiture électrique pourra céder de l’électricité au réseau intelligent de distribution de l’électricité. Sachant qu’une voiture stocke environ 10 kWh, s’il y a un million de voitures électriques en France en 2020, cela représente 10 GWh de stockage de l’électricité, soit l’équivalent de 10 réacteurs nucléaires !

Dans les débats politiques, la vision systémique manque cruellement et nous sommes pénalisés par une vision extrêmement analytique. Pour les énergies, nous raisonnons encore en termes de centrales ou de filières, alors que le futur énergétique doit se penser en termes de « dé-centrales » interconnectées entre-elles et de matrices multimodales intégrant toutes les énergies renouvelables : du solaire à la biomasse en passant par la l’éolien, la géothermie ou l’hydroélectricité. Ce modèle est valable à condition que ces énergies intermittentes soient combinées à d’autres qui sont fixes et distribuées ensuite dans le Smart Grid qui se met en place progressivement dans le monde entier.

Une véritable démocratie énergétique est entrain de naitre avec le partage de l’énergie en peer to peer, une sorte d’Internet de l’énergie qui nous conduira vers l’éco-mobilité. L’auto-mobilité nous a permis de nous libérer du temps et de l’espace et des monopoles des transports collectifs ferroviaires en partie. L’info-mobilité qui a 30 ans nous a permis grâce à la télévision, aux ordinateurs et aujourd’hui au smart phone de créer de l’information et d’en recevoir. Le smartphone est devenu en quelque sorte l’équivalent de l’automobile sur les routes de l’information, mais il nous manque encore l’éco-mobilité. 

Ce que j’appelle l’ « éco-mobilité », c’est la capacité de créer de l’énergie, de la partager, de l’échanger, notamment par les réseaux intelligents et le mix énergétique. Elle nous permettrait de sortir progressivement du nucléaire d’ici 25 à 30 ans. Les américains ont déjà un mot pour ça , ils appellent ça des « Pro-sumers », c’est à dire des producteurs-consommateurs de l’électricité.

Malheureusement, les responsables politiques et les grandes industries continuent à se structurer sous forme pyramidale « top down » (du haut vers le bas) et ne semblent percevoir cette réalité en mouvement. Par exemple, je pense qu’on ne parle pas assez d’hydrogène… L’hydrogène sera du soleil en conserve, produit par l’électrolyse de l’eau grâce à l’énergie solaire ou par la biomasse, il sera incontestablement un des fluides vecteurs énergétiques du futur, y compris dans le transport. 




J’ajouterais enfin que la voiture n’est plus une boite avec des roues qui transporte des gens. Elle devient progressivement un service relié au smartphone, à l’internet intelligent du futur. Votre voiture électrique se partage à distance et sera bientôt capable de vous dire où et comment vous recharger en temps réel. La notion du transport change complètement, promue par quelques acteurs engagés et clairvoyants. Je pense que l’Avere-France, qui s’appuie sur ces nouveaux arguments, participe à cette mutation qui va ouvrir la route vers la démocratie énergétique et à la véritable éco-mobilité. 

Petites Observations Automobile - septembre 2012



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Jeudi 20 septembre 2012

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