Par Patrice Vergès. Depuis qu’il est entré comme simple vendeur chez un concessionnaire de la firme allemande mi 1973, Jean Paul a vendu environ 10 000 BMW.
Jean Paul Robert ne vend que des BMW depuis août 1973. Un sacré bail !
Aujourd’hui, PDG d’une grande concession BMW, Jean Paul se souvient de ses débuts en 1973. L’opportunité pour lui de conduire l’une des voitures qu’il vendait à cette époque. Une magnifique coupé 30 CSI E9 (8200 exemplaires produits) qui correspond sensiblement aujourd’hui à un coupé 640i 6 cylindres turbo de 320 ch vendu plus de 100 000 euros agrémenté des inévitables options qui, chez BMW, valent le prix d’une Dacia neuve chez Renault. C’était déjà le tarif en euros constants de la 30 CSI de 1973 qui coûtait 75 000 francs alors que le Smic était à moins de 1000 francs par mois. Son 6 cylindres de 3 litres délivrant 200 ch l’emmenait à près de 220 km/h. Heureuse époque où la vitesse était encore libre pour peu de temps, d’ailleurs. Reconduire cette voiture datant de ses débuts réveille bien des souvenirs à sa mémoire
Avec son interminable capot abritant son gros 6 cylindres en ligne de 200 ch, le coupé 30 CSI avait une sacrée allure.
« Liste d’attente pour la 2002 TI »
« Je n’en ai pas beaucoup vendues car avec ses 17 ch, elle était pénalisée par la grosse vignette. Ce qui étonne aujourd’hui, c’est la visibilité par rapport à nos voitures actuelles. Dire que nous roulions à 200 km/h sur les routes avec ! » Pourtant, la 30 CSI était appréciée par la sécurité qu’elle offrait par ses 4 roues indépendantes et son puissant freinage à 4 disques. Aujourd’hui, c’est une belle grand-mère qu’il ne faut pas trop bousculer. Mais elle est encore follement séduisante. L’étonnante visibilité offerte par sa vaste surface vitrée étourdit. On se sent nu dans l’habitacle aquarium, exposé aux regards des autres. Regards qui se détournent beaucoup car ce coupé a une sacrée allure. Avec en fond sonore le chant feutré du 6 cylindres, Jean Paul se souvient.
L’intérieur d’une 30 SCI ne manquait pas de classe. Il n’y avait pas de glaces électriques à l’avant. C’était déjà en option !
Ce qui étonne aujourd’hui lorsqu’on conduit une 30 CSI, c’est la fabuleuse visibilité !
« Je me suis présenté comme vendeur en août 1973 j’ai été embauché immédiatement. A l’époque, BMW dépendait encore d’un importateur (Zola Auto), et il y avait des listes d’attente pour les 2002 TII livrées au compte-goutte. Souvent les acheteurs n’avaient pas le choix de la couleur. La mode était à l’orange.
En 1973, le cheval de bataille c’était la 1602 dont la teinte orange appelée « sécuritaire » était très prisée
Nous vendions surtout des modèles 1602 et également la marque Austin distribuée par un autre importateur. Surtout des Mini dont la finition était déplorable. Je ne m’imaginais pas que j’en revendrai 30 ans plus tard »
« On allait le soir chez les clients »
La crise de l’énergie qui apparaît quelques mois plus tard qui limite la vitesse et fait exploser le prix du carburant de 40 % n’est guère favorable à cette marque connotée trop sportive. Son patron le licencie. Mais comme Jean Paul parvient à vendre des voitures (surtout des 1502, une version dépouillée) et finalement il le garde. « C’était un autre temps. On allait vendre les voitures le soir chez les clients. On essayait la voiture, on discutait du crédit autour d’un apéritif. A l’époque, il n’y avait pas de réduction. S’il n’y avait pas de reprise, on offrait un poste de radio ou l’option glaces teintées uniquement sur la grosses cylindrées »
Puis les ventes reprennent doucettement avec l’apparition de la nouvelle Série 3 en 1975. De vendeur, Jean Paul est promu chef des ventes à la fin des années 70 puis avec son ami Christian qui travaille à l’après vente, il rachète en plusieurs fois les parts de son patron qui désire prendre sa retraite pour finalement en devenir les deux PDG..
Fabuleuse 2002 Turbo
FIn 1973, la BMW 2002 Turbo de 170 ch (avec Turbo écrit à l’envers pour être lu à l’endroit dans le rétroviseur) a beaucoup marqué le jeune vendeur
En 40 ans, certains modèles l’ont marqué plus que d’autres. « Je me souviens très de la 2002 Turbo avec Turbo écrit à l’envers. Avec ses 170 ch, elle avait des performances extraordinaires pour l’époque. Les premières 323 6 cylindres en 1978 avec leur deux sorties d’échappement lâchaient une magnifique sonorité ! Lorsque la 524 TD est arrivée en 1984, nous n’y croyions pas. Nous ne voulions pas vendre des voitures de chauffeur de taxis comme Mercedes. Nous avions tort !
En 1984 quand la version diesel 524 TD de 115 ch a vu le jour, le réseau n’y croyait pas
Dire qu’aujourd’hui, c’est 90 % de nos ventes. Je me souviens aussi de l’arrivée du X5 qui a été un événement pour notre marque. J’ai un formidable souvenir des premières M3 4 cylindres et de quelques essais avec des clients qui attaquaient vraiment très fort. Après quelques chaleurs, j’ai préféré leur laisser les clés. Beaucoup d’émotion lorsque j’ai vu la superbe Z1 avec ses portes électriques». Lorsqu’il est entré en 1973, la concession BMW vendait autour de 60 voitures par an, chiffre qui a grimpé à 200 dans les années 90 pour atteindre autour de 400 aujourd’hui. Ce qui donne grosso modo, le chiffre de 10 000 BMW neuves vendues en 40 ans.
« Je n’ai conduit que des BMW »
Les voitures ont changé pendant ces 40 années, les méthodes de ventes aussi. « Plus question d’aller chez les clients le soir. Les gens ne veulent plus être dérangés. Nous les prospectons à l’aide de mailings et d’invitations ciblés à découvrir le modèle. Lorsqu’ils viennent à la concession, ils savent déjà tout grâce à internet. Bien sûr, les gens négocient bien plus qu’avant mais il ne faut oublier que 75% de notre clientèle souhaite se faire reprendre la voiture ce qui joue positivement dans l’acte d’achat par rapport à certaines promos qu’ils lisent sur Internet ».
En fait, Jean Paul n’a pratiquement conduit que des BMW dans sa vie. « Aujourd’hui je roule avec un Gran Coupé 640 D. Entre BMW et moi, c’est un mariage d’amour. J’ai parfois essayé des Audi et Mercedes. Ce sont sûrement de bonnes voitures, mais je ne pourrai pas rouler avec. Ce n’est pas mon univers ! »
Nous arrêtons la 30 CSI devant la concession sous le regard émerveillé d’un jeune vendeur qui n’était certainement pas né quand ce modèle est sorti. Il la regarde sous toutes les soudures avec un regard envieux. Hier comme aujourd’hui, BMW a toujours construit des voitures à forte personnalité.
40 ans séparent cette même génération de coupé. La poupe des modèles actuels est extraordinairement massive par rapport à celle d’il y a 40 ans.
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Vendredi 10 octobre 2014
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