Par Patrice Vergès. Nous voici déjà aux portes des années 90. Au rythme environ d'une quarantaine de voitures par an plus une quinzaine d'anciennes pour des rubriques rétro, je conduis les principales nouveautés du moment.
Je me souviens de la XM Citroën qui fut un véritable événement autant par son audace esthétique (13 vitres) que sa modernité technologique notamment au niveau de sa suspension hydractive très intuitive. En revanche, le freinage ABS de série manquait encore un peu de subtilité. Une route bosselée en descente rendant les freins totalement inefficaces me fit traverser un carrefour, lancé à prés de 90 km/h, sans m'arrêter. Ouf !
A la même époque, la Peugeot 605 nous bluffa par sa tenue de route exceptionnelle et son "toucher à la route. " C'est la concurrente des BMW et Mercedes " martela Jacques Calvet, président de PSA à une conférence de presse digne de celle du lancement du Titanic. Je le crus évidemment et j'en conseillai l'achat au directeur de mon canard. Fatale erreur ! Comme tous les possesseurs des premières 605 et XM, il se rendait toutes les semaines à la concession Peugeot. Ces deux modèles étaient si salopés que leurs constructeurs lancèrent une campagne de rappel en concession et aussi à l'usine pour les remettre au niveau. Plus de 100 000 voitures à revoir en détail. Une première en France ! Cette voiture joua certainement un rôle néfaste dans mon avancement surtout le jour où mon DG perdit les essuies-glace sous la pluie. A part cela, c'était une super voiture et me rappelle avoir roulé à 230 km/h au volant de la version SV 24 soupapes de 200 chevaux sur des pistes en Égypte. On avoinait encore à cette époque.
Les voitures des services presse étaient généralement méchamment affutées. En visitant une usine de moteur 6 cylindres chez BMW, nous vîmes sur la chaîne un moteur où sur une étiquette, il était écrit "spécial presse". Les Alfa Turbo 155 du parc presse marchaient comme des avions, comme je l'ai déjà écrit à l'aide un simple trombone qui bloquait la soupape de décharge du waste-gate. Chardonnet, l'importateur Lancia faisait carrément préparer les moteurs (grosses soupapes) et mastiquer les gouttières pour améliorer le Cx des voitures testées par les magazines sportifs.
Des belles surprises
Belles sensations sportives avec la BMW M3 6 cylindres de 286 ch au bruit sublime et aux performances exceptionnelles. Joie également avec la Volvo 850 traction avant dont les 5 cylindres chantaient fort et première vraie Volvo (hors 480) qui ne tenait pas la route comme une brouette. Merveilleuses sensations au volant de la Honda Civic VTEC dont le petit 1600 montait à 9000 tr/min comme un fleur dans un jouissement grave. Sauvage mais excitante, la Saab 9000 Aéro 2,3 l turbo dont les 225 chevaux tiraillaient le malheureux train avant dans tous les sens. Bien-être avec la nouvelle 190 E, première Mercedes enfin excitante à conduire qui allait concurrencer la BMW Série 3 alors sans adversaire.
Par son intelligence, son confort et son habitabilité, la Fiat Tipo m'avait impressionné. J'en avais commandé une. En fait j'en ai acheté deux. Pourquoi ? Lorsque j'ai reçu la mienne, une grimace déforma mon visage d'homme déjà mûr. C'était l'effort. La direction n'était pas assistée alors que les voitures essayées à Paris lors de sa présentation et celles du service de presse avaient une assistance. "Ma. C'étaient des voitures italiennes dont la direction assistée n'a pas été retenue pour la France !" m'expliqua Fiat. Devant ma contrariété et mon irritation, Fiat s'engagea à me la reprendre pour me la remplacer par une 1600 DGT à direction assistée dès qu'elle fut importée quelques mois plus tard. C'était une bonne voiture très robuste de surcroit mais à la finition bâclée comme toutes les Fiat de cette époque.
ABS, barres dans les portes, 16 soupapes et catalyseur
Au début des années 90, c'était la grande mode de la ligne bio toutes ronde. Les voitures avaient des silhouettes molles et dégoulinantes notamment les Japonaises comme le coupé Toyota Celica et la berline Mazda 626 (à moteur Comprex) qui ressemblait comme deux goutes d'eau à la future Renault Safrane alors très attendue chez Renault. Un jour où je me garais chez Renault avec une Mazda 626, beaucoup ont imaginé que je roulais au volant d'un prototype de la Safrane. Cette dernière était une bonne voiture mais qui n'offrait pas encore la qualité des produits teutons. La version Biturbo poussée à 268 chevaux par un préparateur allemand était une vraie catapulte (250 km/h) mais son prix surréaliste proche de 400 000 francs en 1993 en limita sérieusement sa production.
Le progrès était en marche. Ce début des années 90 fut marqué par la généralisation de l'ABS sur les hauts de gamme, de l'injection mono-point et multi-point qui remplaça le bon vieux carburateur quand le pot catalytique fut obligatoire. D'abord sur les plus de 2 litres avant d'en équiper toutes les voitures en enlevant souvent un peu de vie au moteur. Pot qui fut lié au carburant sans plomb dont il n'était pas toujours facile de trouver des pompes dédiées dans toutes les localités. Que de sueurs froides lors de certains voyages dans la France profonde.
C'était aussi des débuts de la sécurité passive trop longtemps oubliée. On ne parlait pas encore d'étoiles Euro-Ncap, mais de barres dans les portes pour absorber les chocs latéraux. Audi avait inventé une vacherie nommé le Procon-ten sous forme de câbles qui tiraient le moteur vers le sol en cas de choc frontal. Le truc idéal pour détruire complètement une voiture. Quand le remède est pire que la mal !
Coup de chaleur en Florida
En revanche, quelques voitures m'ont déçu notamment les Ford généralement sans âme, sans confort et sans qualités dynamiques. La première Mondeo était si impersonnelle qu'elle exigea un restylage trois ans après sa naissance. Déception aussi avec la Ford Orion, ersatz d'Escort à trois volumes qui flottait étrangement sur la route à cause d'une suspension trop assouplie. Mais la pire des pires fut la calamiteuse Fiesta Turbo de 133 chevaux dont le train avant n'avait qu'une unique obsession ; quitter la route !
J'avais qualifié la silhouette plate et molle de la Mercedes Classe S de " limande pommes vapeur " ce qui me valut des histoires avec le service de presse dont l'humour n'était pas la qualité première. Déception aussi avec la Porsche 968 qui se ventait d'avoir sorti le plus gros 4 cylindres de 3 litres à la sonorité sans âme. Le comble pour une Porsche ! Autant la Polo G40 avec son compresseur m'avait enthousiasmé autant la Golf G60 s'avéra décevante surtout face à la version VR6 à la merveilleuse musicalité.
Terrible déception au volant de la Yugo Florida qui était une Tipo yougoslave construite par Zastava. Dessinée par Giugiaro elle était plus belle que sa génitrice. Mais je me rendis vite que la qualité du montage ne valait pas celle des Fiat ; boîte imprécise, odeur d'essence, mauvaise insonorisation, etc. Comme je crevais de chaleur dans l'habitacle qui se distinguait par une superbe planche de bord comptant 16 aérateurs, j'ouvris l'aération et la ventilation. Cela ne changea grand chose. En m'arrêtant, je m'aperçu que la majorité des grilles de climatisation était seulement sculptée sur la planche de bord. Hermétiques, elles n'étaient reliées à aucune bouche d'aération....
L’avis des Petits Observateurs
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