Porsche 911, 50 ans et pas une ride. Le designer Michael Mauer s'explique.

Michael Mauer, directeur du design Porsche, nous explique comment la 911 est à l’origine de toute l’identité Porsche et nous présente la septième génération. par Renaud Roubaudi




N’est-ce pas frustrant d’avoir le sentiment de toujours dessiner la même voiture ?

Non, c’est comme si vous deviez écrire le prochain chapitre d’une histoire connue, vous devez tenir compte du passé. Bien sûr, parfois vous pouvez regretter ce manque de liberté, mais c’est la règle du jeu. Il s’agit d’une évolution intelligente de l’identité Porsche. C’est d’ailleurs la clé du succès de la longévité de la 911 qui a toujours anticipé ses évolutions, avant même de voir ses ventes faiblir. À la différence des généralistes qui peuvent se tromper sur un modèle, nous n’avons tout simplement pas le droit à l’erreur. La 911 est vitale du fait qu’elle conditionne l’avenir de la société.



Comment décrire les fondements du design Porsche ?

C’est simple, tout part de la Porsche 911 apparue en 1963. C’est elle l’ADN de la marque. Elle définit les codes du design de toutes les générations de Porsche qu’il s’agisse des différentes versions de 911 depuis 48 ans, mais aussi le Boxster, le Cayenne, et la Panamera. 



Quels sont ces codes de design intangibles ?

Il y en a cinq. En premier lieu l’absence de grille de calandre du fait que le moteur soit en position arrière et n’a donc pas besoin de refroidissement par l’avant. C’est une grande différence par rapport aux marques qui construisent leur identité autour de leur calandre. Il y a ensuite les phares ronds que l’on retrouve systématiquement, même s’il y a parfois de légères variantes. Le profil est caractérisé par la « fly line », il s’agit de la pente du toit qui tombe en douceur vers la vitre et le capot moteur. L’arrière se reconnaît par des ailes très marquées, bombées, à l’image d’épaules d’athlètes. Enfin, les vitrages de côté forment un tout uniforme, comme une goutte d’eau profilée.

Quoi de neuf sur la nouvelle 911, septième du nom ?

L’avant s’est élargi, car la voiture doit offrir de nouvelles possibilités en terme de dynamisme de conduite, le châssis avait besoin de s’étoffer un peu de l’avant. Il ne s’agit que de quelques millimètres, mais compte tenu des proportions typiques de la 911 avec son avant plutôt étroit et son arrière plus large, on le remarque facilement. Les feux de jours à led qui s’étirent jusqu’au flanc apportent une touche de modernité. Les phares sont toujours ronds, mais si vous regardez de plus près, ils sont plus étirés qu’avant, un peu plus ovales d’où un dynamisme accru. Ils sont aussi plus éloignés l’un de l’autre, ce qui s’explique par l’élargissement du châssis. Cela donne un regard plus ouvert, la 911 a l’air plus sûr d’elle même. À l’arrière, les feux sont devenus extrêmement étroits, ce qui accentue la largeur du dos de la voiture.

Le profil semble aussi légèrement différent ?

Oui. L’empattement (la distance entre chaque roue) a été allongé, mais le porte à faux (la distance entre la roue et l’avant et l’arrière) a été réduit. Nous avons pu aussi baisser la hauteur du toit de quelques millimètres. Au final, la 911 est désormais plus plate et cela apporte plus de sportivité. Mais à l’intérieur on ne le sent pas, car les fauteuils ont été abaissés.

Que faut-il avoir en tête quand on dessine une 911 ?

La base de tout ce sont les proportions qui font pour ainsi dire tout le caractère d’une voiture. De nombreuses voitures se ressemblent par leurs proportions et sans certains artifices tels que la forme de grille de calandre, leur design ne se distinguerait pas des autres. La 911 en revanche est reconnaissable entre mille grâce à la simplicité de ses proportions. Même sans badge, on l’identifie. Il faut donc respecter ses proportions. Après, on passe au détail qui donne du caractère. Avez-vous remarqué que sur la nouvelle 911, les rétroviseurs sont désormais fixés sur les portes ? C’est pour moi la signature des vraies voitures de sport.

La planche de bord apparait plus luxueuse, proche de celle de la Panamera. Y a-t-il aussi des codes intérieurs à respecter chez Porsche ?

Oui. La clé de contact est toujours à gauche. Les compteurs sont dans des fûts ronds et le cockpit est toujours orienté vers le conducteur, car c’est la personne la plus importante à bord. Ensuite, chaque fonction correspond à une seule commande. Cela peut représenter beaucoup d’interrupteurs, mais c’est notre philosophie.

Pensez-vous déjà à la prochaine génération ?

Pas encore, mais cela va venir vite. C’est notre job de toujours nous projeter à dix ans. Mais j’avoue que pour le moment, je me dis que ce sera difficile de faire mieux.



Petites Observations Automobile - janvier 2012