Souvenirs d’autos (23) : la Peugeot 204 de l’homme invisible

 Par Thibault Chatel*. Nous sommes en 1972 et tout commence par une horrible nouvelle ! Jacques Ary, le grand ami de ma famille, ce type sensationnel qui fait tout le temps des blagues, qui monte des canulars insensés, a vendu sa Cadillac ! Il roule désormais en 204 Peugeot. Quand j’apprends la nouvelle, je suis désespéré…



Petit rappel de la Cadillac de Jacques : elle était siglée « Mobylette » et possédait aussi quelques gadgets maison que je raconterai dans un autre épisode. Pourquoi Jacques s’est-il acheté une 204 ? A-t-il des problèmes d’argent ? Je l’ignore. Ce que je sais, c’est que je fais une drôle de tête en découvrant la 204. Dieu sait que j’aime les autos françaises, mais quand même une 204 pour remplacer une Cadillac… c’est dur.

Jacques voit que j’ai du mal à masquer ma désapprobation et me glisse dans le creux de l’oreille : « Tu as raison, Thibaut… une 204 c’est moins bien… MAIS, elle permet de laisser conduire l’Homme Invisible ! ». Puis, il éclate de rire. Sincèrement, je ne comprends pas ce qu’il veut dire, mais ça va venir.



Ce jour-là, on va « je ne sais où » et on se suit. Je monte avec Jacqueline, ma mère et Edward, mon beau-père, dans leur Ford Escort et Jacques nous suit dans sa 204. Nous quittons Puteaux et nous allons rejoindre l’autoroute de l’ouest. À l’époque, le tunnel est à double sens. Eh oui !

Sur l’autoroute, je regarde derrière nous et je vois la 204 qui nous suit sagement… Quel coup Jacques est-il en train de préparer ? Le temps passe… le temps est toujours un peu long en auto quand on est gosse, même si on joue au jeu des départements avec les plaques d’immatriculation, le guide Michelin en main pour vérifier…

Et puis soudain, je comprends ce que voulais dire Jacques. La 204 nous double. Au volant, il n’y a personne ! En effet, c’est l’Homme Invisible qui conduit ! Jacques, lui, lit tranquillement son journal à la place du passager !! L’effet est sensationnel… sans parler du sourire de Jacques tellement content de sa magnifique farce !

Ce bandit de grand chemin avait bricolé tout un bazar de tirettes, de tringles, qui lui permettait de piloter son auto de la plage du passager ! Mais il m’avait expliqué qu’il ne pouvait faire ce coup que sur autoroute car son ingénieux système lui permettait juste de garder les roues droites… mais pas de prendre un virage !

Voici une photo qu’il avait envoyée à mon père avec cette légende : « À part une légère perte de poids, tout va bien. Amitiés. Jacques »



Petit Bonus : Jacques Ary vivait à Élysée 2, une sorte de ville nouvelle dans la banlieue ouest, dans un immeuble moderne. Il avait fait un trou entre la cuisine et le salon… et quand on dînait chez lui, un petit train électrique déposait les plats sur la table ! Voilà… de quoi était capable le grand Jacques Ary… simplement pour faire rire ses amis.

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 *Je m’appelle Thibaut, je suis né en 1959. Il se trouve que j’ai toujours adoré les automobiles… Pourquoi ? Sans doute parce que j’aime l’idée de liberté. On monte dans sa voiture, on démarre, on s’en va ailleurs. Là où il fait beau, au bord de la mer, à la campagne… peu importe. Parfois, je repense à des histoires d’enfance, d’adolescence, de jeunesse et j’ai décidé de les livrer à P.O.A.